Curieux, passionné, engagé, Victor Diaz Lamich va épouser deux passions: la conscience sociale et l’environnement.
Certains se lanceraient en politique, lui a choisi d’offrir ses yeux au public. C’est dans sa lentille, qu’il promène partout dans le monde, que Victor Diaz Lamich veut éveiller les consciences. Exilé du coup d’état chilien, il partagera l’importance des racines, en immortalisant les plus belles images de sa terre natale. Personnage atypique, il mettra à contribution ses connaissances en chimie environnementale pour réaliser des instantanés des désastres écologiques. Son arme de conviction massive, c’est son appareil photo qu’il transporte avec lui dans toutes les circonstances. En Inde, sur la route des jeunes musiciens du monde, donnera naissance à un livre photographique de référence. Il sera des plus grands festivals au monde où son œil aiguisé, réussira à arrêter le temps.
La sensibilité de Victor Diaz Lamich est celle des grands créateurs, des grands artistes. On peut aisément penser qu’il suffit d’appuyer sur un bouton pour qu’une photo prenne naissance, quelle hérésie! Allez dire à Rodin qu’il suffisait de modeler et ensuite de fondre du bronze pour créer le penseur. Allez dire à Botticelli qu’il suffisait de lever les yeux pour peindre un plafond comme celui de la Chapelle Sixtine… Réussir à saisir le moment, l’endroit, le portrait, l’évènement, est un art. L’offrir au public pour le faire grandir, est le meilleur exemple de la générosité humaine.
Victor Diaz Lamich fait partie de ces artistes qui partagent, qui questionnent, qui doutent également. Toutes ces qualités sont retrouvées dans ses œuvres. Créateur, travailleur et inlassable chercheur, il nous propose aujourd’hui de donner une deuxième vie à ses photographies. À moins que l’aluminium qui les supporte nous révèle une autre histoire… À vous de le découvrir.
Robert Frosi, Radio-Canada
C’est vers l’âge de 5 ans, en regardant les œuvres sur cuivre d’artistes chiliens, que je fus captivé. Il s’agissait d’assiettes, de poêlons, d’ustensiles de cuisine et d’outils du quotidien, forgés et travaillés par des artistes. Une fois frottés, ils devenaient brillants, luisants, rayonnants, très attrayants pour l’imaginaire de l’enfant que j’étais. Ce fut mon premier contact avec l’art sur métal.
Plus tard, je recevais en cadeau mon premier appareil photographique. Avec la caméra, je compris rapidement que j’aimais avoir l’attention de mes contemporains lorsque je pointais le magique appareil en leur direction. Ensuite, une fois les photos développées, j’observais attentivement mais discrètement leurs expressions, commentaires et j’attendais avec impatience le moment où leur visage changerait à la vue de leur portraits. Beaucoup plus tard, je fis mes pas dans la photographie sérieuse, lisant sur la vie et l’œuvre des grands photographes, étudiant les techniques et scrutant les appareils. J’appris alors que M. Daguerre et son daguerréotype -il y a presque 200 ans- imprimait une image sur une plaque de cuivre recouverte d’une fine couche d’argent pour donner naissance à la toute première «photo»! J’étais renversé. Un nouvel art était né.
Plusieurs décennies plus tard, le virage numérique allait me propulser à faire de la photographie, mon métier. Du coup, je fut saisi par la vertigineuse vitesse de l’évolution de la caméra. J’avais la possibilité de faire mille et une images, de les modifier, de les partager, de les stocker, de les faire vivre sur plusieurs plateformes et supports.
Puis un événement vint tout changer.
La perte d’un être cher secoua toutes mes certitudes. J’entrepris alors un long voyage au sud de notre continent, au bout de la terre, là où toutes les routes s’appellent Ruta del fin del Mundo, en Patagonie, terre sauvage aux confins de l’Amérique australe.
C’est donc à Terre de Feu que débuta une fabuleuse aventure qui allait me mener au Parc National des Glaciers où 47 éternels, inscrits à l’UNESCO, m’attendaient depuis plus de 15 mille ans. Sur le bateau, nous étions de toutes nationalités et de tous âges à quelques mètres d’un merveilleux et imposant monstre de glace nommé Perito Moreno. Quel phénomène!! Il bouge, il craque, il gronde, il pleure des stalagmites de dizaines de mètres qui le fondent lentement. La glace de ce géant s’érige devant moi sur plus de 75 mètres (25 étages) et date de la dernière glaciation… Et si nous sommes prudents, nous pourrons y toucher! À ce moment, tous se précipitent sur leur appareils cellulaires, photos, vidéo et caméras afin de partager l’expérience avec les absents. Pendant un long moment, je ne peux qu’admirer la sublime beauté du spectacle millénaire se dressant devant nous.
Pendant que tous s’affairent à partager l’éphémère moment, moi je m’applique à immortaliser l’éternel géant.
C’est donc en Patagonie devant un des plus importants glaciers de l’hémisphère sud, que j’ai compris l’importance de certains sentiments négligés, voire oubliés. En revenant aux origines de l’image imprimée, je me suis penché sur un projet d’émotions. Dans un monde où tout est rapide, j’ai eu envie de m’arrêter, de regarder de contempler. Vivant au Québec, l’un des berceaux de l’aluminium mondial, le choix était clair. Les thèmes tantôt abstraits, tantôt figuratifs, piquent la curiosité et provoquent des émotions. Par l’étonnante variété de reflets de couleurs brossées et par les perspectives qu’elle nous offre, l’œuvre sur métal prend vie, nous conquiert, nous envoûte. L’élément métallique ajoute à la beauté et au mystère du sujet imprimé. L’aluminium brossé reconduit alors avec force et longévité mes images du bout du monde.
Victor Diaz Lamich